Pour améliorer l’emploi des personnes handicapées, le gouvernement veut revoir le système de l’obligation d’emploi et alléger les démarches administratives. Anne Baltazar et Didier Eyssartier, présidente et directeur général de l’Agefiph, livrent un aperçu des mesures actuellement en discussion avec le gouvernement.

Deux projets de loi, mais trop peu d’avancées. Le projet de loi Pacte (plan d’action pour la croissance) et celui « pour la liberté de choisir son avenir professionnel » (formation et chômage) ne convainquent pas les responsables de l’Association de gestion du fonds pour l’insertion des personnes handicapées (Agefiph). « En l’état actuel des textes, nous sommes plutôt déçus », déplore Didier Eyssartier, directeur général de l’Agefiph. « Et même inquiets ! » intervient la présidente de l’association, Anne Baltazar. Heureusement, les discussions continuent entre les associations et le gouvernement sur la stratégie à adopter pour stimuler l’emploi des personnes handicapées. Les mesures issues de ces concertations seraient intégrées au projet de loi Pacte, qui devrait être présenté le 20 juin.

L’objectif du gouvernement, annoncé lors du lancement de la concertation handicap en février 2018, est de réduire le nombre des modalités d’exécution de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés (OETH), afin de mettre l’accent sur l’emploi direct de personnes handicapées.

Qu’est ce que l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés aujourd’hui ?
Depuis la loi du 10 juillet 1987, les entreprises privées de 20 salariés et plus ont l’obligation de compter au moins 6 % de personnes handicapées dans leur effectif. Pour satisfaire à cette obligation, elles ont plusieurs options :

  • recruter directement des personnes handicapées ;
  • faire appel au secteur protégé et adapté et aux travailleurs indépendants handicapés ;
  • signer un accord agréé par l’Etat sur l’emploi des personnes handicapées ;
  • accueillir des stagiaires ou des personnes handicapées pour des périodes de mise en situation en milieu professionnel ;
  • verser une contribution à l’Agefiph.
Fin des accords agréés

L’un des points en discussion : la suppression du système des accords agrées, qui est aujourd’hui l’une des modalités valables de remplir son obligation d’emploi de travailleurs handicapés (voir encadré ci-dessus). Un accord d’entreprise, d’établissement ou de groupe, agréé par l’Etat, portant sur l’emploi des personnes handicapées exonère l’entreprise de sa contribution à l’Agefiph (durant la durée de cet accord), même si elle n’atteint pas le quota de 6 %. L’accord doit prévoir des dépenses au moins égales au montant qui aurait dû être versé en tant que contribution à l’Agefiph. Mais ce dispositif ne s’avère pas incitatif à augmenter le taux d’emploi.

« L’Agefiph ne récupère aucune ressource de la part de l’entreprise qui a recours à un accord agréé, explique Anne Baltazar, présidente de l’Agefiph. Ce qui in fine posera problème au regard de la mutualisation, puisque ces mêmes entreprises profitent quand même des aides de l’Agefiph. De plus, les évaluations montrent que le taux d’emploi des entreprises couvertes par ces accords n’augmente que de 0,7 % sur la durée de l’accord, puis n’augmente plus même si l’accord est renouvelé. Ensuite, ces entreprises stagnent à 4 ou 4,5 % ». Ces accords pourraient donc ne plus être des modalités d’accomplissement de l’OETH. Les entreprises couvertes par ces accords ne seraient plus exonérées de contribution à l’Agefiph.

L’OETH pour toutes les entreprises

Autre piste envisagée : élargir l’obligation d’emploi aux petites entreprises. Une mesure à laquelle la secrétaire d’Etat Sophie Cluzel est favorable, de même que Didier Eyssartier : « Aujourd’hui, plus de 50 % des placements de travailleurs handicapés faits par Cap emploi sont à destination d’entreprises de moins de 20 salariés. De même, près de 50 % de nos aides vont vers ces petites entreprises. Cela pose encore un problème de mutualisation. Ceux qui contribuent le plus ne sont pas ceux qui profitent le plus des aides. » Le ministre de l’économie Bruno Le Maire a annoncé en début de mois que le seuil de 20 salariés serait supprimé dans la loi Pacte, de même que les obligations sociales et fiscales y étant liées, « à l’exception de celles liées à l’emploi de personnes en situation de handicap ».

« Pour l’instant, les textes n’apportent rien de révolutionnaire, et je ne m’attends à rien de tel, regrette Didier Eyssartier. A nous de jouer notre rôle, en proposant une offre lisible pour les personnes et les entreprises ». L’Agefiph a justement lancé le mois dernier une version rénovée du catalogue de ses offres, plus lisible et plus simple.

Source – Actuel CE