Dans le secteur alimentaire et notamment au sein des grandes surfaces, de nombreux salariés travaillent le dimanche. Si certains sont volontaires, d’autres ne souhaitent pas travailler le dimanche. Pour ceux qui s’y refusent, doivent-ils craindre un licenciement pour faute à l’image de ces deux salariés de chez Cora© licenciés récemment pour avoir refusé de travailler le dimanche ?
Virés pour avoir refusé de travailler le dimanche !
Deux salariés de chez Cora© Saint-Malo viennent d’être licenciés pour avoir refusé de travailler le dimanche, dont Christèle LAURENT.
Cette salariée de chez Cora© vient d’être licenciée pour faute grave après 18 ans passés dans ce supermarché pour avoir refusé de travailler le dimanche 17 mars 2019.
Selon son témoignage recueilli sur BTMTV et sur TF1, elle explique avoir tout de même accepté de travailler 4 dimanches en 2018 et devoir en effectuer 6 sur l’année 2019.
Mais lorsque son employeur lui a demandé de travailler le dimanche 17 mars, cette fois-ci, elle a refusé ! C’était la première fois en 18 ans de service.
Les explications recueillies auprès de vous lors de notre entretien ont été claires et vous avez mentionné le refus total de venir travailler le dimanche matin. Au vu de ces éléments, je me vois contraint de vous notifier votre licenciement immédiat pour faute grave.
La Direction de Cora© Saint-Malo
Son refus de venir travailler le dimanche a pourtant été assimilé par son employeur à une faute grave justifiant son licenciement et celui de son collègue, lui aussi licencié pour faute grave alors qu’il comptait 8 ans d’ancienneté chez son employeur.
Le refus de travailler le dimanche est-il une faute grave justifiant un licenciement ?
Règlementation applicable dans les commerces de détail alimentaire (supermarché ou hypermarché)
Les commerces de détail alimentaire peuvent ouvrir le dimanche jusqu’à 13 heures de façon permanente et sans autorisation préalable (1).
Ces salariés sont alors a priori, tenus de venir travailler à la demande de leur employeur.
Ils bénéficient en contrepartie d’un repos compensateur par roulement et par quinzaine, d’une journée entière.
Pour ceux qui travaillent dans une grande surface (dont la surface de vente est supérieure à 400m²), ils ont également droit à une majoration de salaire d’au moins 30%.
Tous les salariés ont-ils l’obligation d’accepter de travailler le dimanche ?
Pour les salariés nouvellement embauchés et qui travaillent dans une grande surface habituellement ouverte le dimanche, on peut valablement penser que l’obligation de travailler le dimanche est inscrite dans leur contrat de travail.
En revanche, qu’advient-il des salariés embauchés il y a plusieurs années, lorsque les grandes surfaces n’ouvraient pas encore le dimanche ?
C’est le cas des deux salariés de chez Cora©, qui a décidé d’ouvrir les dimanches matin à compter de mars 2018.
Lorsque Christèle LAURENT a signé son contrat de travail lors de son embauche en 2001, elle avait accepté de travailler du lundi au samedi et les dimanches ouverts à l’occasion des fêtes de fin d’année.
En dehors de la période des fêtes de fin d’année, elle bénéficiait de son jour de repos hebdomadaire le dimanche.
Lorsque son employeur a choisi d’ouvrir tous les dimanches matin (et non plus seulement les dimanches de fêtes), il n’a fait signer aucun avenant aux anciens salariés (d’après les dire de la salariée).
Il n’est indiqué nulle part qu’elle doit travailler le dimanche. À partir de là, l’employeur n’avait pas le droit de l’obliger à venir travailler.
François MACQUAIRE, défenseur syndical CFTC
Ainsi, le fait de lui imposer de venir travailler le dimanche constituait une modification d’un élément essentiel du contrat de travail, nécessitant son accord préalable.
En effet, la modification de la répartition du temps de travail des salariés nécessite l’accord des salariés concernés (accord qu’elle n’avait a priori pas donné).
La modification du contrat de travail ne peut être décidée unilatéralement par l’employeur.
💡 À retenir : Le refus d’une modification d’un élément essentiel du contrat de travail ne constitue pas un motif de licenciement disciplinaire. |
Dès lors, n’ayant pas donné son accord par écrit (ni dans son contrat de travail, ni par avenant), on ne voit pas en quoi son refus de venir travailler le dimanche pourrait être constitutif d’une faute grave justifiant son licenciement.
Pour rappel, pour qu’il y ait faute grave, il faut :
- un manquement du salarié à l’une de ses obligations contractuelles : ça ne semble pas être le cas ici ;
- l’impossibilité pour l’employeur de maintenir le salarié dans l’entreprise : la salariée n’ayant commis aucun manquement à ses obligations contractuelles, il ne semble exister aucun fait fautif susceptible de justifier l’impossibilité pour l’employeur de la maintenir dans l’entreprise.
Par conséquent, le licenciement pour faute grave ne semble pas justifié pour ces salariés de Cora©.
Votre employeur vient de vous licencier pour faute grave et vous pensez que ce licenciement n’est pas justifié ?
Quel recours ont les salariés pour contester leur licenciement ?
La salariée tente pour l’instant une négociation à l’amiable avec son employeur pour obtenir réparation du préjudice causé.
Mais elle l’assure, si son employeur ne donne pas suite, elle saisira les Prud’hommes.
Sans aucune intention de se faire juge de l’affaire, la rédaction de Juritravail estime que cette salariée pourrait obtenir gain de cause si elle décidait de saisir le Conseil de prud’hommes.
Ce dernier pourrait en effet requalifier son licenciement en licenciement abusif.
Privée de toute indemnité du fait de son licenciement pour faute grave, la salariée pourrait dès lors prétendre notamment :
- et à des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse;
- à l’indemnité légale de licenciement (ou conventionnelle si celle-ci s’avère plus favorable).
Pour calculer le montant de votre indemnité légale de licenciement, Juritravail vous propose un simulateur de calcul.
NB : Cet article est rédigé avec les informations recueillies auprès de différents médias journalistiques et nous n’avons pas en notre possession le contrat de travail de la salariée, ni même la lettre de notification de son licenciement. L’analyse proposée ici n’engage donc pas la rédaction des équipes de Juritravail.
Référence :
(1) Article L3132-13 du Code du travail
Source – JuriTravail