Trois décrets publiés récemment au Journal officiel mettent en oeuvre la réforme de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés, issue de la loi Avenir professionnel. Ces textes réglementaires précisent les nouvelles modalités de calcul de la contribution due, la simplification, de la DOETH via la DSN et les nouvelles règles applicables aux accords agréés.

La loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel a modifié l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés (OETH). Les nouvelles règles doivent entrer en vigueur au 1er janvier 2020. Trois décrets d’application ont été publiés récemment au Journal officiel. Nous récapitulons ce qui va changer à cette date.

Déclaration obligatoire d’emploi des travailleurs handicapés

Le premier décret concerne la DOETH. Si le taux d’emploi des personnes en situation de handicap reste fixé à 6 % de l’effectif de l’entreprise, les modalités de calcul changent à partir du 1er janvier 2020.

Premier changement : les règles de calcul des effectifs sont désormais alignées sur les dispositions de l’article L.130-1 du code de la sécurité sociale créé par la loi Pacte du 22 mai 2019.

A noter : dans les entreprises de travail temporaire, les groupements d’employeurs et les entreprises de portage salarial, l’effectif ne prend pas en compte les salariés mis à disposition ou portés.

Le nombre de salariés devant être embauchés au titre de l’OETH résulte du produit de l’effectif d’assujettissement par le taux d’obligation d’emploi (6 %), arrondi à l’entier inférieur.

 

A compter du 1er janvier 2020, tous les contrats de travail seront pris en compteintégralement au titre de de l’OETH, quelles que soient la durée et la nature du contrat (y compris les stagiaires, les personnes en période de mise en situation professionnelle et les personnes mises à disposition par les ETT ou les groupements d’employeurs), au prorata de son temps de travail sur l’année.

A noter : s’agissant des salariés d’au moins 50 ans, le nombre de bénéficiaires de l’OETH résulte du produit du nombre de bénéficiaires de l’OETH âgés d’au moins 50 ans par 1,5. Pour ce calcul sont pris en compte les bénéficiaires qui atteignent 50 ans au cours de l’année civile. Cette nouvelle règle vise à valoriser l’emploi de seniors handicapés.

Seconde modification : les modalités de déclaration de l’employeur sont simplifiées. Actuellement, la déclaration d’emploi des travailleurs handicapés (DOETH) est réalisée par télé-déclaration ou sur papier par les employeurs. Cinq formulaires sont nécessaires. A compter du 1er janvier 2020, la DOETH s’effectuera directement via la déclaration sociale nominative (DSN). Par ailleurs, le recouvrement de la contribution sera assuré par les Urssaf et les caisses de la MSA afin que l’entreprise ait un interlocuteur unique.

A noter : toutes les entreprises seront tenues de déclarer le nombre de travailleurs handicapés, y compris celles de moins de 20 salariés, quand bien même elles ne sont pas soumises à l’OETH et ce, afin de mieux connaître la réalité de l’emploi des personnes handicapées et de proposer aux employeurs une offre de service adaptée.

Afin que l’employeur puisse établir sa DOETH, l’Urssaf et la MSA devront transmettre à l’employeur, au plus tard le 31 janvier de l’année suivant celle au titre de laquelle cette déclaration est effectuée, les informations suivantes :

  • l’effectif d’assujettissement ;
  • le nombre de bénéficiaires de l’obligation d’emploi devant être embauchés ;
  • l’effectif de bénéficiaires de l’OETH ;
  • l’effectif de salariés relevant d’un emploi exigeant des conditions d’aptitude particulières.

Les entreprises de travail temporaire et les groupements d’employeurs devront transmettre à chaque employeur à la même date une attestation annuelle portant sur le nombre de bénéficiaires de l’OETH mis à disposition. Le modèle de transmission de ces informations sera défini par un arrêté ultérieur.

Les entreprises adaptées, les établissements ou services d’aide par le travail et les travailleurs indépendants handicapés devront quant à eux adresser à leurs entreprises clientes une attestation annuelle (qui sera également fixé par arrêté). Le document devra comprendre :

  • le montant du prix hors taxe des fournitures, travaux ou prestations figurant aux contrats réglés par l’entreprise au cours de l’année considérée ;
  • le montant de la différence entre ce prix hors taxe et les coûts des matières premières, des produits, des matériaux, de la sous-traitance, des consommations intermédiaires et des frais de vente et de commercialisation, effectivement payés dans l’année ;
  • le montant de la déduction avant plafonnement prévue au premier alinéa de l’article D.5212-22.

A compter de l’année 2021, l’employeur devra renseigner annuellement dans la DSN effectuée pour la période d’emploi du mois de février de l’année suivant celle au titre de laquelle la DOETH est effectuée :

  • le nombre de salariés handicapés mis à sa disposition par une entreprise de travail temporaire ou un groupement d’employeurs ;
  • le montant de la contribution initialement due, avant les déductions pouvant être opérées ;
  • le montant de la déduction non-plafonnée liée à la conclusion de contrats de fournitures, de sous-traitance ou de prestations de service avec des entreprises adaptées, des Esat ou avec des travailleurs indépendants handicapés ;
  • le montant de la déduction non-plafonnée liée au nombre de salariés de l’entreprise exerçant des emplois exigeant des conditions d’aptitude particulière ;
  • le montant de la contribution due par l’employeur pour chacun des bénéficiaires de l’obligation qu’il aurait dû employer ;
  • le cas échéant, s’il s’acquitte de l’OETH par la conclusion d’un accord agréé de branche, de groupe ou d’entreprise.

L’employeur devra verser le montant de la contribution, lorsqu’elle est due, à la date de déclaration précitée.

A noter : lorsque l’entreprise comprend plusieurs établissements, la déclaration et le versement sont effectués par un seul de ses établissements.

L’employeur devra porter à la connaissance du CSE la déclaration annuelle, à l’exclusion de la liste nominative des bénéficiaires de l’OETH.

 

Mise en oeuvre de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés par application d’un accord agréé

Le deuxième de ces décrets concerne les accords agréés portant sur l’emploi de travailleurs handicapés. L’employeur peut en effet s’exonérer de la contribution due, s’il a signé avec les partenaires sociaux un accord agréé par l’État comportant des mesures favorables au recrutement ou au maintien du travailleur handicapé pour un montant au moins égal au montant de la contribution due. Ou bien encore, s’il applique un accord de branche agréé.

A compter du 1er janvier 2020, ces accords pourront toujours être conclus, sauf au niveau d’un établissement. Ils seront limités à trois ans, renouvelables une fois.

A noter : les accords signés avant le 1er janvier 2020 resteront applicables.

Afin de pouvoir être agréé, l’accord devra comporter un plan d’embauche et un plan de maintien dans l’emploi dans l’entreprise, s’accompagnant d’objectifs, au nombre desquels devront figurer, pour chaque année d’exécution du programme :

  • le nombre de bénéficiaires de l’OETH rapporté à l’effectif d’assujettissement ;
  • le nombre de ces bénéficiaires dont le recrutement est envisagé.

A noter : le programme pluriannuel devra être établi par année civile.

L’accord devra par ailleurs préciser le financement prévisionnel des différentes actions programmées. Ce financement devra être au moins égal, par année, au montant de la contribution due au titre de cette même année, à l’exclusion des dépenses prises en compte au titre de la déduction. Le montant de ce financement devra être révisé chaque année. Les montants non dépensés seront reportés sur l’année suivante.

A noter : lorsque le programme comporte des actions de sensibilisation des salariés de l’entreprise, ou des actions de pilotage et de suivi, les sommes dédiées ne pourront excéder 25 % du total des sommes consacrées au financement des actions prévues par l’accord.

Une fois l’accord conclu, il devra être transmis pour agrément à l’autorité administrative par la partie la plus diligente, au plus tard le 31 mars de la première année de mise en oeuvre du programme, selon des modalités qui devront être définies par arrêté. L’autorité administrative prendra en compte la nature, la portée et la cohérence des différentes actions envisagées, ainsi que le respect des obligations liées au contenu de l’accord.

Les autorités compétentes pour l’agrément de l’accord

L’autorité administrative compétente dépend de la nature de l’accord :

  • Le ministère du travail pour les accords de branche ;
  • le préfet du département où est situé le siège de l’entreprise pour les accords d’entreprise ;
  • le préfet du département où est situé le siège de l’entreprise dominante pour les accords de groupe.

L’agrément sera délivré pour la durée de validité de l’accord. Il pourra être renouvelé une fois pour une durée maximale de trois ans (un arrêté devra en fixer les modalités). Le renouvellement sera apprécié au regard du bilan quantitatif et qualitatif du programme réalisé et du nouveau programme pluriannuel et après présentation du bilan au CSE ou au comité de groupe (ou après examen par la branche du bilan et de la demande de renouvellement).

L’employeur (ou la branche) devra effectivement transmettre dans les deux mois qui suivent le terme de l’accord :

  • les bilans annuels et le bilan récapitulatif des actions réalisées dans le cadre de l’accord, en précisant leur financement ;
  • le solde des dépenses exposées pour la mise en oeuvre du programme au regard du montant des contributions.

L’entreprise (ou la branche) devra aussi communiquer, à la demande de l’autorité administrative, les pièces justificatives nécessaires au contrôle du bilan récapitulatif des actions réalisées.

Sort des sommes non utilisées

En cas de renouvellement, l’autorité administrative pourra autoriser le report total ou partiel du solde non utilisé sur le nouveau programme. Le solde devra sinon être versé à l’Urssaf (ou à la MSA) à hauteur des dépenses prévues par l’accord et non réalisées.

 

Modalités de calcul de la contribution due au titre de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés

Enfin, le dernier décret détaille les modifications apportées à la contribution due au titre de l’OETH.

Le décret fixe le barème de calcul de la contribution des entreprises dans le cadre de l’OETH en fonction de leurs effectifs. La contribution est égale au produit :

1°) du nombre de travailleurs handicapés bénéficiaires de l’OETH manquants, résultant de l’écart entre le nombre de bénéficiaires de l’OETH devant être employés et le nombre de bénéficiaires de l’OETH :

2°) par les montants suivants, déterminés en fonction de l’effectif d’assujettissement de l’entreprise :

  • 400 fois le Smic horaire pour les entreprises de 20 à moins de 250 salariés ;
  • 500 fois le Smic horaire pour les entreprises de 250 à moins de 750 salariés ;
  • 600 fois le Smic horaire pour les entreprises de 750 salariés et plus.

A noter : Le montant de la surcontribution est égal à 1 500 fois le Smic horaire. Elle est due par les entreprises qui n’ont occupé aucun bénéficiaire de l’OETH pendant trois ans ou qui n’ont pas passé de contrat de fourniture de sous-traitance ou de prestation de services avec des entreprises adaptées ou des Esat. Dans ce dernier cas, elle sera due à compter du 1er janvier 2020 si le montant des contrats est inférieur sur quatre ans, à 600 fois le Smic horaire.

Le décret précise également les dépenses qui seront déductibles de la contribution due. Aujourd’hui, il existe 13 catégories de dépenses qui sont déductibles du montant de la cotisation due par l’entreprise. A compter du 1er janvier 2020, les dépenses déductiblesdu montant de la cotisation due par l’entreprise seront recentrées autour de trois catégories :

  1. la réalisation de diagnostics et de travaux afin de rendre les locaux de l’entreprise accessibles aux bénéficiaires de l’OETH  ;
  2. le maintien en emploi au sein de l’entreprise et la reconversion professionnelle de bénéficiaires de l’OETH par la mise en oeuvre de moyens humains, techniques ou organisationnels compensatoires à la situation de handicap, à l’exclusion des dépenses déjà prises en charge ou faisant l’objet d’aides financières délivrées par d’autres organismes ;
  3. des prestations d’accompagnement des bénéficiaires de l’OETH, des actions de sensibilisation et de formation des salariés réalisées par d’autres organismes pour le compte de l’entreprise afin de favoriser la prise de poste et le maintien en emploi de bénéficiaires de l’OETH.

A noter : le plafond de la déduction restera inchangé, à hauteur de 10 %.

S’agissant des autres dépenses et afin d’inciter le recours à la sous-traitance, elles pourront faire l’objet d’une déduction en appliquant un taux de 30 % au prix hors taxes des fournitures, travaux ou prestations figurant au contrat de fournitures, de sous-traitance ou de prestations de services avec des entreprises adaptées, des Esat ou des travailleurs indépendants handicapés, duquel seront déduits les coûts des matières premières, des produits, des matériaux, de la sous-traitance, des consommations intermédiaires et des frais de vente et de commercialisation.

A noter la déduction ne pourra pas dépenser un plafond dépendant du nombre de bénéficiaires de l’OETH : il ne pourra pas excéder 50 % lorsque l’entreprise emploiera moins de 50 % de personnes handicapées par rapport au taux de 6 % exigé, 75 % dans les autres cas.

Mesures transitoires

Les dispositions relatives au calcul de la contribution entrent en vigueur le 1er janvier 2020 et s’appliquent aux obligations courant à cette date. Des mesures transitoires sont prévues pour les années 2020 à 2024 via une modulation de la contribution.

Source – Actuel Expert-Comptable